Ce tableau reprend deux vers d’un livret de Paul Valery, La cantate de Narcisse, commandé au poète en 1938 par la compositrice Germaine Tailleferre, du Groupe des Six. L’œuvre met en scène Narcisse insensible au charme des nymphes et amoureux de son seul reflet. On lit dans la scène VI, comme sur le tableau : « Des ruines du jour, hautes métamorphoses / L’or en cendres descend sur la forme des choses ». Il n’est pas inintéressant pour saisir l’intention du peintre de rappeler toute la strophe :

« NARCISSE : (…) Ô Nymphe, j’appartiens à mon divin danger :
Je ne vous puis aimer que je ne me trahisse…

– LA NYMPHE : Trahis !… Pourquoi ne pas le trahir, ce Narcisse,
Rompre ce long regard qui te perd la raison
Et distraire de l’onde un œil qui s’adoucisse ?
Regarde quel beau soir pour une trahison :
Des ruines du jour, hautes métamorphoses,
L’or en cendres descend sur la forme des choses ;
Tout l’orgueil du soleil n’est plus que peu de roses
Qui périssent sur l’horizon… »

On pourra comparer à loisir l’éloignement progressif de la figuration que connaît alors la peinture de Zumstein, et cet appel de la Nymphe à cette « trahison », au nom de plus « hautes métamorphoses » où règne « la forme des choses ». On pourra aussi mesurer la profondeur et la précision de la culture poétique de Zumstein.